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Pour l’abolition de la note scolaire
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Pan à la note ! Panote ...

 Pourquoi les professeurs mettent-ils des notes à leurs élèves ?

 Pourquoi, alors qu’aucun texte légal ne leur en fait une obligation, qu’ils ne risquent donc pas de sanctions pécuniaires s’ils s’en défont ?

 Pourquoi, alors que la note ne fait pas apprendre et qu’elle fait perdre du temps ?

 Pourquoi, alors que les parents ne peuvent rien faire avec le verdict (… votre fille a 5 – ou elle a 15 - sur 20 en chimie) puisqu’ils ignorent comment le professeur est passé d’une analyse multidimensionnelle de la prestation à une note unidimensionnelle ?

 Pourquoi, alors qu’en outre, les parents ignorent comment le professeur a fait apprendre en amont, ou le professeur a appris à noter, ce qui l’anime ? Quels paramètres relationnels entrent en jeu dans ce jeu unilatéral ?

 Pourquoi noter, enfin, alors que professeurs et parents ignorent les ressorts psychiques de l’élève soumis au questionnement ?

Charles Pepinster

La Loi ? Le Décret ? Qui fait la loi, ici ?
Les épreuves externes communes (CEB) dans le contexte juridique belge
Article mis en ligne le 6 mai 2009
dernière modification le 13 février 2010

Les enseignants employés par des Pouvoirs Organisateurs communaux que j’ai rencontrés en formation sont décontenancés. D’une part le Pacte Scolaire du 29 mai 1959 fait, Í leurs yeux force de Loi. Il reconnaÍ®t la liberté de choix des méthodes pédagogiques par chaque Pouvoir Organisateur.

D’autre part, un décret de la Communauté Française de Belgique oblige toutes les écoles Í soumettre leurs élèves de 6ème primaire Í un examen externe certificatif. Celui-ci intervient, disent les maÍ®tres les plus lucides, au cœur même du choix pédagogique. C’est indéniable.

Que Monsieur le Ministre de l’Éducation décide des méthodes pour les écoles qu’il organise en primaire, c’est son droit. Il peut installer les examens qu’il veut dans 10% des écoles primaires, celles qu’on appelle "de la Communauté Française" dont il est le Pouvoir Organisateur. Peut-il imposer ses méthodes Í tous ?

Rien de plus légitime donc, pour ces enseignants – chercheurs, volontaires pour se former, que de se demander si la cour d’arbitrage ou le Conseil d’État n’auraient pas Í se prononcer pour clarifier cette situation juridiquement.
Les arguments ne manquent pas pour soutenir la liberté de refuser les évaluations externes émanant du Ministère de l’Éducation dans les écoles libres, communales, provinciales.
Ainsi, le Conseil de l’Enseignement des Communes et Provinces (C.E.C.P.) recommande comme objectifs généraux Í l’enseignement fondamental communal et provincial « La confiance en soi, la capacité Í être des citoyens responsables, capables de contribuer Í une société démocratique, solidaire (…) »

Or, le chef-d’œuvre pédagogique, comme couronnement de l’école primaire, tel que je l’ai mis au point il y a 25 ans, apporte non seulement la preuve des compétences requises et des comportements citoyens mais développe la confiance en soi et la solidarité, ce que les examens externes entravent. LÍ , je peux en témoigner, j’ai développé l’objection de conscience Í la notation et j’ai refusé d’organiser l’examen cantonal, dans le canton scolaire que le Ministre m’avait confié, parce que je trouvais cette procédure toxique et en contradiction avec mes valeurs ... J’ai ensuite eu gain de cause au Ministère en 1982 quand j’y fus convoqué.

A mon initiative, un décret du 3 mai 1999 a validé le chef-d’œuvre pédagogique comme moyen d’obtenir le CEB pour les adultes en alphabétisation et les détenus. Pourquoi pas pour tous ?
D’autre part la nouvelle organisation des écoles en cycles convient très bien Í l’élaboration du chef-d’œuvre pédagogique.

LÍ , les élèves de 5ème voient ce qui les attend en fin de 6ème et ils le souhaitent :
donner, lors d’une allocution d’une ou deux heures, la preuve que l’on sait parler en public, lire, écrire, calculer, faire usage de la géographie, de l’histoire, des sciences, animer une assemblée, monter une exposition, peindre, chanter, danser, ... ceci tout en rencontrant les autres : on leur apporte de l’instruction, après avoir reçu leur aide fraternelle lors de la préparation du sujet choisi en concertation. Pas d’exclusion.

Que font, dès lors, les cadets du cycle terminal de l’école primaire lorsque les aÍ®nés bachotent, sous leur nez, pour l’examen final individualiste, identique pour les enfants des Marolles et ceux de Woluwé-Saint-Lambert, centré sur le scolaire écrit, négligeant le culturel et la très importante place du langage oral ? Musique, théÍ¢tre, peinture, poésie, nature... la vraie vie, o͹ êtes-vous ?
Quels sentiments développent-ils devant ce spectacle anxiogène, ceux Í qui ce sera le tour l’an prochain de voir s’assécher la formation humaniste, de risquer l’exclusion ?

Le C.E.C.P demande, lors des formations des enseignants, « une cohérence entre les pratiques de formation et les pratiques de classe ». Très bien, les formateurs ne contrÍ´lent pas les acquis des stagiaires. Souvent, ils invitent ceux-ci Í créer du neuf au lieu de se soumettre Í des questionnaires arbitraires dont les réponses individualistes … iraient Í la poubelle.
Pourquoi ces enseignants ainsi formés, devraient-ils être, en fin d’école primaire les simples transmetteurs de questionnaires externes élaborés par d’autres et dont ils contestent l’utilité, déplorent le dévoiement statistique ?

Alors que l’imagination et l’entraide sont au cœur de l’élaboration et de la présentation du chef-d’œuvre pédagogique, en parfait accord donc avec les recommandations du Décret Mission, l’individualisme, la compétition, la soumission, le manque de perspectives culturelles habitent les examens externes. J’ai inspecté les écoles pendant 18 ans et je peux en témoigner… On répète, répète, répète Í partir des feuilles de l’an passé, oui, c’est vrai ! Très rares sont les exceptions.

Une autre réflexion : beaucoup de classes terminales se transforment en machines Í angoisser, au grand dam des maÍ®tres "encarcanés", comme disent les enseignants du Mali, aussi cernés par la folie du mesurage mangeur de temps, d’énergie et d’idéal.

Mais ce qui est nouveau, c’est que les parents ont maintenant accès aux questionnaires des années précédentes, tout comme les enseignants ! On alimente donc une seconde machine infernale au sein du havre de paix que devrait constituer le milieu familial.

Il faut dénoncer l’effet pervers majeur des examens externes : la justification -tout au long des études- de la marchandisation de l’école, de la ravageuse spéculation par des interros, contrÍ´les, concours et examens notés (donc payés) préparatoires, sans parler du découragement des enseignants les plus conscients des enjeux sociétaux de l’école, ceux qui veulent préparer, dès l’école, une société plus créative et solidaire dont on a un urgent besoin. La Loi ? Le Décret ? Qui fait la Loi, ici ?

Ou bien on abroge la liberté du choix des méthodes (donc du choix des évaluations) prévue par le Pacte Scolaire ou bien on modifie le Décret qui institue l’épreuve externe obligatoire certificative en fin de scolarité primaire. Ce décret devrait être modifié pour permettre le choix entre différentes formes de certification, comme c’est le cas jusqu Í présent… ou bien il devrait supprimer la barrière persistant entre le primaire et le secondaire. Celle-ci, en effet, est devenue obsolète, les élèves étant embarqués dans un continuum de cycles traversant le primaire et le secondaire .

Charles Pepinster

 Instigateur du GBEN (Groupe Belge d’Éducation Nouvelle - 1983)
 Fondateur de la Maison des Enfants, Í Buzet (Floreffe, Belgique)
 Ancien inspecteur cantonal